Sujets de lettres - ENS 2026
site de sujets du CAPES
https://neoclassica.co/2021/03/23/sujets-du-capes-externe-de-lettres-modernes/
Domaine 3 : l'œuvre littéraire et le lecteur
Session 2017
« Jamais, moi vivant, on ne m’illustrera, parce que : la plus belle description littéraire est dévorée par le plus piètre dessin. Du moment qu’un type est fixé par le crayon, il perd ce caractère de généralité, cette concordance avec mille objets connus qui font dire au lecteur : « J’ai vu cela » ou « Cela doit être ». Une femme dessinée ressemble à une femme, voilà tout. L’idée est dès lors fermée, complète, et toutes les phrases sont inutiles, tandis qu’une femme écrite fait rêver à mille femmes. Donc, ceci étant une question d’esthétique, je refuse formellement toute espèce d’illustration. »
Gustave Flaubert, Lettre à Ernest Duplan, 12 juin 1862,
in Extraits de la correspondance ou Préface à la vie d’écrivain,
présentation et choix de Geneviève Bollème, Paris, Seuil, 1963, p. 223-224.
Session 2010
S’appuyant sur une remarque de Paul Valéry, Pierre Bayard dans Comment parler des livres que l’on n’a pas lus ? déclare :
« Valéry incite à penser en termes de bibliothèque collective et non de livre seul. Pour un vrai lecteur, soucieux de réfléchir à la littérature, ce n’est pas tel livre qui compte, mais l’ensemble de tous les autres, et prêter une attention exclusive à un seul risque de faire perdre de vue cet ensemble et ce qui, en tout livre, participe à une organisation plus vaste qui permet de le comprendre en profondeur.
Mais Valéry nous permet aussi d’aller plus loin en nous invitant à adopter cette même attitude devant chaque livre et à en prendre une vue générale, laquelle a partie liée avec la vue sur l’ensemble des livres. »
Pierre Bayard, Comment parler des livres que l’on n’a pas lus ?,
Paris, Éditions de Minuit, 2007, p. 42.
Session 2005
« Avec des mots si j’essaie de recomposer mon attitude d’alors, le lecteur ne sera pas dupe plus que moi. Nous savons que notre langage est incapable de rappeler même le reflet de ces états défunts, étrangers. Il en serait de même pour tout ce journal s’il devait être la notation de qui je fus. Je préciserai donc qu’il doit renseigner sur qui je suis, aujourd’hui que je l’écris. Il n’est pas une recherche du temps passé, mais une œuvre d’art dont la matière-prétexte est ma vie d’autrefois. Il sera un présent fixé à l’aide du passé, non l’inverse. Qu’on sache donc que les faits furent ce que je les dis, mais l’interprétation que j’en tire c’est ce que je suis devenu. »
Jean Genet, Journal du voleur (1949)
[Gallimard, coll. Folio, 1982, pp. 79-80]
Session 1988
Commentez et discutez ce jugement de Marthe Robert : « Ce qui importe d’abord dans la vie, selon un rabbin du Talmud (1) : transformer son miroir en une fenêtre ouverte sur la rue. C’est aussi la loi de toute littérature vraie, la fausse étant celle où l’auteur se contente de se contempler, en prétendant de surcroît que le lecteur y trouvera autant de joie qu’il en a pris lui-même à sa propre image. »
La Tyrannie de l’imprimé, Paris Grasset, 1984, p. 49
1. Talmud : « Compilation de commentaires sur la Loi de Moïse fixant l’enseignement des grandes écoles rabbiniques […]. Le Talmud est un des ouvrages les plus importants du Judaïsme. » (Larousse)
Domaine 4 : la représentation littéraire
Session 1982
« Il n’y a qu’un seul sujet de roman : l’existence de l’homme dans la cité et la conscience qu’il prend des servitudes entraînées par le caractère social de cette existence. La nature et la portée d’un roman dépendent alors des rapports qu’il institue entre l’auteur, les personnages et le public. (…) Le roman se dégage sans doute du milieu collectif où il a pris naissance, dans la mesure où, œuvre d’art, il aspire à trouver une forme. Comme récit au contraire, il y appartient profondément et y rentre pour ainsi dire. Il est un élément actif et vivant de la société, l’exprime pour une part et pour l’autre contribue à la transformer, indissolublement, mais en proportions variables, aveu et appel, représentation et volonté, peinture et dramaturgie, en un mot puissance qui modifie continuellement ses propres causes. »
Roger Caillois, Puissances du roman (1941)
sujet en rapport avec Jean de Léry
Dissertation
« Peut-être reconnaîtra-t-on ici la modernité du projet lérien en même temps que ses limites : la quête d’un savoir sur le monde, si familière aux auteurs de récits de voyage à la Renaissance, se voit ici concurrencée par le trésor d’une expérience qui ne saurait seulement servir à authentifier la connaissance des horizons lointains. L’écriture sur l’autre serait peut-être ici, déjà, une tentative d’écriture sur soi. » (Marie-Christine Gomez-Géraud, « Un colloque chez les Tououpinambaoults : mise en scène d’une dépossession », dans D’Encre de Brésil. Jean de Léry écrivain, textes réunis par Frank Lestringant et Marie-Christine Gomez-Géraud, Orléans, Paradigme, 1999, p.162).
Dans quelle mesure ce propos sur Histoire d’un voyage fait en la terre du Brésil de Jean de Léry éclaire-t-il votre lecture de ce récit ?
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