Sujets de dissertation de lettres

site avec des sujets du CAPES/CAFEP externe de Lettres modernes (1975-2025) 

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KH

H. Godard écrit dans L’autre face de la littérature. Essai sur André Malraux et la littérature (Paris, Gallimard, 1990, p. 42-43) :

« Toute œuvre est un système de formes qui n’existent pas telles quelles dans le monde réel. Nous n’éprouvons jamais celui-ci que comme une totalité et comme une confusion. Il nous déborde de toute part. Il est sans limite, à chaque instant il se dérobe à notre prise. Tout s’y tient, et la diversité des plans de notre expérience y multiplie à l’infini les liens de tout avec tout. Les formes que nous percevons dans l’œuvre ne peuvent donc résulter que du découpage et des choix que l’artiste y a opérés. Or l’idée même d’un découpage et de choix de ce genre, chaque nouvel artiste ne peut la tenir que des œuvres de ses prédécesseurs. « Un poète ne se conquiert pas sur l’informe, mais sur les formes qu’il admire. » Il s’ensuit que la création passe nécessairement d’abord par l’imitation, quand ce n’est pas par le pastiche. »

« Jamais, moi vivant, on ne m’illustrera, parce que : la plus belle description littéraire est dévorée par le plus piètre dessin. Du moment qu’un type est fixé par le crayon, il perd ce caractère de généralité, cette concordance avec mille objets connus qui font dire au lecteur : « J’ai vu cela » ou « Cela doit être ». Une femme dessinée ressemble à une femme, voilà tout. L’idée est dès lors fermée, complète, et toutes les phrases sont inutiles, tandis qu’une femme écrite fait rêver à mille femmes. Donc, ceci étant une question d’esthétique, je refuse formellement toute espèce d’illustration. »

Gustave Flaubert, Lettre à Ernest Duplan, 12 juin 1862,
in Extraits de la correspondance ou Préface à la vie d’écrivain,
présentation et choix de Geneviève Bollème, Paris, Seuil, 1963, p. 223-224

HK

LE LECTEUR

« Le lecteur n'est pas supposé voir le travail. Lui, c'est un passager. Il a payé sa place, il a acheté le livre. Il ne s'occupe pas de ce qui se passe sur le pont, il ne sait pas comment on conduit le navire, Lui, il veut jouir. La délectation. Il a le livre, il doit se délecter. Mon devoir à moi est de le faire se délecter et à cela je m'emploie. »

Louis-Ferdinand CELINE, dans « Louis-Ferdinand Céline vous parle »

 

« Il n'y a pas d'un côté la littérature, et de l'autre la vie ; il y a au contraire, dans la vie elle-même, des formes, des élans, des images et des styles qui circulent entre les sujets et les œuvres, qui les exposent, les animent, les affectent. Car les formes littéraires se proposent dans la lecture comme de véritables formes de vie, engageant des conduites, des démarches, des puissances de façonnement et des valeurs existentielles. »

Marielle Macé, Façons de lire, manières d'être, 2011

 

 

LE PERSONNAGE

« Un personnage, comme tout autre élément purement fictionnel, se réduit à son rôle dans le récit. / Même la biographie la plus longue ne saurait décrire exhaustivement une personne humaine, mais ce que Jane Austeen dit d'Emma Woodhouse' la décrit exhaustivement. / Un personnage peut être compris complètement, alors que l'être humain (...) demeure toujours quelque part opaque pour les autres. / Un personnage ne possède pas d'autre secret que ceux qui sont compris dans l'intervalle de cinq actes, (ou) entre les couvertures d'un livre ».
Margaret Mac Donald, Le langage de la fiction, trad. de l'anglais, 1954.

 

 

LA VERITE ET LE MENSONGE

« Le roman dépeint un monde où toute vérité est devenue problématique. L’erreur est partout, la certitude nulle part. Les signes et le langage sombrent dans l’ambiguïté. Ils sont devenus trompeurs comme les apparences. »
Philippe Walter, Le Livre du Graal, Pléiade, tome III, 2009

 

« Un romancier […] ne peut donc se délivrer du mensonge qu’en exploitant les ressources multiples du mensonge. (De cette origine – accession à la vérité par le détour du mensonge – l’œuvre tire ses contradictions et ses ambiguïtés.) Quand il donne au mensonge un corps et s’approprie son langage, ce ne peut être qu’à seule fin d’instituer un monde de vérité. Autrement dit encore, le langage romanesque n’assure sa fonction qu’en recourant aux moyens dont se sert le mensonge, et c’est même, paradoxalement, la seule fonction qu’il puisse accomplir en toute vérité. »
Louis-René des Forêts, Voies et détours de la fiction, Fata Morgana, 1985

 

« Une écriture trop soignée ou trop manifeste réveille chez le lecteur […] une méfiance dont il saurait difficilement se défaire, même s’il comprend qu’elle est sans fondement. Quand l’art se voit trop, il paraît artifice ; et l’artifice, dissimulation, ou comédie. Entre l’art et la « sincérité », le lecteur finit par croire qu’il y a antinomie. […] La vérité est exactement le contraire : le discours ne la masque pas, mais la produit à sa manière : c’est-à-dire autant comme effet de l’énonciation que comme « contenu » d’énoncé. Le style est peut-être un masque, mais le masque est la personne, son authentique visage, sous lequel il n’y a rien. »
Ph. Lejeune, Le Pacte autobiographique, « Gide et l’espace autobiographique », 1975

 

 

LE ROMAN

« Je ne puis croire au nécessaire triomphe du Roman. Sa formule est grossière par excellence et sa transsubstantiation médiocre. Il réclame de se développer. Il a besoin du temps. Il lui faut aligner toute une série de causes et d’effets, et il n’est même pas réversible. Comme un long fil d’acier, il doit surtout faire preuve d’une ductilité grande (300 pages) et, pour ne pas se rompre, d’une considérable ténacité. »
Victor Segalen, Sur une forme nouvelle du roman ou un nouveau contenu de l’essai, 1910

 

« Roman signifie exemplarisation. Le roman prouve. Il constitue un discours parabolique, illustratif, donne à souscrire à un sens. Raconter suppose la volonté d’enseigner, implique l’intention de dispenser une leçon, comme aussi celle de la rendre évidente. »
C. Grivel, Production de l’intérêt romanesque (La Haye, Mouton, 1973, p. 318)

 

« Il m’arrive de penser que les romans ont pour but de ramener l’homme à la situation de l’enfance, briser ce cadre qui le limite, que les romans tendent à le mettre dans la situation d’insatisfaction de l’enfant, qui veut toujours en savoir plus. En tout cas, si j’écrivais des romans, moi, ce serait pour cela. Je lis des romans pour cela, pour retrouver cette avidité de connaître. »

Louis Aragon, Blanche ou l’oubli

 

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